dimanche 6 janvier 2013

Pour le mariage égalitaire



Lorsqu’on part loin de son pays et de ses concitoyens pendant quelques semaines, il est parfois délicat de se remettre dans le bain, notamment de celui des idées.
Au retour, force est de constater que certaines questions ont fait couler plus d’encre que d’autres et il est alors difficile de prendre position.

Mais cette fin d’année apocalyptique a des relents de déjà vu concernant l’un de ces débats qui peut faire se hérisser le poil le plus endormi et le plus mal tondu.
Le projet de loi traitant du « mariage pour tous » semble en effet nous rappeler un conflit intemporel, si loin et si proche: celle de la guerre scolaire qui déchira l’opposition la plus réactionnaire ainsi que la majorité socialiste de l’époque, entre 1983 et 1984, pour son épisode le plus contemporain


Partisans mais surtout opposants n’hésitent d’ailleurs pas à employer cet argument tel un bouclier : d’aucuns ne souhaitant théoriquement raviver cette guerre, personne n’en étant sorti franchement glorieux.
Il va de soi que, de façon sous-jacente, ni la majorité, ni l’opposition, ne songent effectivement à se référer aux guerres scolaires qui de 1789  à 1905 menèrent finalement et fort heureusement à la loi du 9 décembre 1905, portant sur la séparation des Eglises et de l’Etat, qui devait mettre tout le monde d’accord, théoriquement.
L’Histoire nous apprend que la pratique en fut et en est toute autre, même encore aujourd’hui. D’assouplissements intellectuels ou électoralistes à de sombres décrets, aujourd’hui cinquantenaires pour certains, le principe de neutralité, des Eglises à l’égard de l’exercice de l’Etat et réciproquement, semble surtout soumis aux intérêts de tout un chacun à l’instant T.
Point de projection vers l’avenir, par souci de pérennité des idées, par souci de progrès intellectuel, social ou humaniste.
La légitimité d’un tel projet de loi, aussi confus soit-il dans sa conception, sa rédaction ou présentation, n’est absolument pas le sujet.

Les querelles de ces quarante-huit dernières heures sont soulevées par l’opposition parlementaire. Vivement, avidement conseillée essentiellement par les sons de cloches de paroisses revanchardes, dont les motivations semblaient pourtant enterrées avec la hache de guerre du PACS, il y a près de quinze ans.
Le motif de cette énième puritaine indignation? Une lettre présentée comme anodine aujourd’hui par les représentants de la défense dogmatique catholique nationale, rédigée par le secrétaire général de l'enseignement catholique,Eric de Labarre, adressée à l’intention des chefs d’établissements concernés.
Rien d’alarmant à la lecture. Mais les réactions des syndicats d’enseignants du secteur privé, plutôt inquiets voire perplexes ou rageurs suite à cette missive, laissent pantois tant elles sont symptomatiques du décalage que révèle une telle fausse « non prise de position » mal déguisée De Labarre, face à ceux qui exercent la pédagogie sur le terrain. D’une part.
Plus affligeant furent les réactions d’une certaine opposition parlementaire et idéologique, suite à la contre-attaque du ministre de l’enseignement, VincentPeillon, ce vendredi 4 janvier, soit dix jours avant la manifestation des opposants au projet de loi soutenu par la majorité.
Alors que le ministre rappelle très justement que le devoir de neutralité s’impose même aux établissements d’enseignement privé confessionnels en France, (en s'appuyant d'autant plus sur la loi Debré de 1959 leur ayant octroyé des financements publics) concernant les débats politiques au sens propre, certaines têtes de gondoles comme Christine Boutin se réveillent et tapent du poing sur la Bible. Croyant trouver là cette voie sacrée qu’elle emprunta malencontreusement et maladroitement pour sa campagne présidentielle avortée, transcendée alors en chemin vers Saint-Jacques de Compostelle, l’occasion est trop belle pour sortir de l’ombre vers la lumière, embarquant dans son sillage des réseaux sociaux, les ecclésiastiques, tous les militants pro-vie, quitte à brasser jusqu’auprès des plus virulents de chez Civitas et autres organisations, par trop nostalgiques de l’Etat Français, que leurs pairs d’antan jugeaient déjà trop mollassons quant à la collaboration avec l’occupant de l’époque… Mais je m’égare, tout comme eux.

La politique, c’est avant tout ce qui a trait à la vie de la cité. Nul ne saurait oublier cela. N’en déplaise aux défenseurs de colorations chamarrées politiciennes.

Le seul argument que trouvent alors les Croisés, c’est une intervention de Najat Vallaud-Belkacem au sein d’un collège, le 15 octobre 2012 (et non le 5 janvier 2013, comme le prétend la présidente du Parti Chrétien-Démocrate), qui, d’après nos chers inquisiteurs, serait là une preuve de l’interventionnisme du gouvernement Ayrault en faveur du « mariage gay ». Or, il s’agissait là d’une intervention de la ministre des droits des femmes et porte-parole du gouvernement, concernant la sensibilisation à la lutte contre l’homophobie. Cheval de bataille qu’elle enfourcha bien avant l’élection de François Hollande en mai 2012.

Que cette armée de cléricaux s’interroge du hasard de l’agenda de la porte-parole du gouvernement, ce serait alors légitime. Mais non ! Ils préfèrent s’insurger et crier à l’imposture Peillon.
Pourtant, Najat Vallaud-Belkacem et Vincent Peillon ne violent respectivement en aucun cas le principe de neutralité des institutions publiques, concernant la question du mariage pour tous, que je qualifierais plus volontiers de mariage égalitaire.
L’expression de « mariage pour tous » impliquant éventuellement l’imposition de l’union maritale à tout citoyen. Sens sous-jacent que les rebelles susmentionnés à plusieurs reprises feraient mieux de relever un peu plus, histoire de montrer qu’ils savent élever le débat au-delà des querelles de paroisses et de leurs basses-cours. Très basses.
L’instrumentalisation politicienne de l’intervention de la ministre des droits de la femme n’est à ce jour nullement prouvée par l’argumentaire pauvre tel le pèlerin de nos amis des papas et des mamans traditionnels.  

Faut-il donc que ces fats n’aient rien d’autre à se mettre sous la dent ?
Faut-il que l’opposition, à l’unisson,  s’enlise un peu plus dans la malhonnêteté intellectuelle, la lutte contre le progrès social et moral, dans une démarche, une fois n’est pas coutume, allant à l’encontre des principes et idéaux républicains ?

Que le gouvernement en place peine à redresser la barre des questions économiques, qu’il pêche par tentation électoraliste et/ou démagogique concernant certaines questions sociales, philosophiques comme la défense du principe de laïcité, justement, c’est un fait.
Mais on ne saurait lui reprocher de vouloir faire avancer les choses, les mentalités, vers plus d’universalisme, principe philosophique garant de nos institutions



A bas la Calotte et vive la Sociale!






1 commentaire:

  1. Observateur moyen, de loin, de l'autre côté de la frontière, j'ai l'impression que cela devient une guerre de "religion" ; les croyants (intégristes) contre les laïcs. Dans notre petit pays où une loi voté il y a 10 ans autorise le mariage homosexuel, l'archevêque Léonard s'est fendu dernièrement d'une belle tirade (je résume) "ce n'est pas parce que c'est une loi, qu'elle est bonne ; d'autres lois ont été modifiées car elles ne convenaient pas aux travailleurs" (peut-être parlait-il de lois votées à une époque ou une voix de patron valait deux voix d'ouvriers et que l'église avait encore du pouvoir dans les décisions politiques.

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